Comment maîtriser votre hypoglycémie
18 février 2009

C’est le temps des fêtes, et vous avez beaucoup bu, beaucoup mangé. Vous avez profité des plaisirs de la table au maximum et vous vous retrouvez épuisé, irritable, inexplicablement angoissé, sur la défensive… Peut-être ne s’agit-il pas de fatigue, mais plutôt d’hypoglycémie. Cette maladie, qu’on peut également parfois qualifier de pré-diabète, afflige beaucoup plus de gens qu’on peut le croire a priori. Ce qui surprend, par contre, c’est le manque de visibilité qu’elle occupe et l’incompréhension d’une large partie de la population sur les symptômes et les conséquences de celle-ci.

L’hypoglycémie est une baisse du taux de sucre dans le sang, le faisant descendre sous l’extrémité la plus basse d’un taux normal de 4,0 mmol/L. Chez la personne normale, le pancréas sécrète de l’insuline pour contrebalancer une hausse du taux de sucre ou du glucagon, qui lance un signal au foie pour que celui-ci transforme en glucose les glucides qu’il a en réserve, quand le taux est trop faible.

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Chez la personne hypoglycémique, par contre, existe un débalancement qui empêche ce processus de se dérouler normalement. Le résultat est une impossibilité pour le corps de bien transformer ce que vous mangez en une énergie qui puisse être la plus utile pour vous et qui puisse vous animer pour la période la plus optimale.

Résultat? Vous mangez quelque chose de sucré et vous devenez soudainement très animé, voire extatique, et quelques heures plus tard vous devenez morose, déprimé, bête, car votre cerveau ne trouve plus le glucose dont il a besoin. Dans les pires cas, vous pouvez même perdre conscience.

En outre, quand le taux de sucre devient dangereusement bas, le corps sécrète de l’adrénaline, causant de l’anxiété chez l’hypoglycémique et habituellement une rage de sucre permettant de mettre fin temporairement à celle-ci. Malheureusement, tout est à recommencer quelques heures plus tard.

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Je suis hypoglycémique depuis plusieurs années. En fait, probablement depuis mon enfance, moi qui me nourrissais presque exclusivement de sucre, enchaînant les huit gaufres au sirop d’érable du matin, les beignes du midi, le chocolat de l’après-midi, le coke et les sucreries le soir, etc. J’étais accroc, mais j’étais jeune et les jeunes se croient immortels. Et c’est ainsi que j’avançai dans la vie jusqu’au milieu de la vingtaine, ajoutant la bière et les boissons énergétiques à l’équation, fonçant de mon plein gré vers un mur qui allait m’obliger à changer.

Je perdis conscience à trois reprises, dont deux fois en plein restaurant. Avez-vous déjà perdu la carte ainsi? C’est terrible de sentir votre corps se dérober sous vos pieds, de voir vos proches vous parler mais de ne plus percevoir leurs mots, et de se réveiller perdu, tel un enfant qui vient de naître, avec la nausée et la honte, l’humiliation d’avoir eu l’air si faible.

Mais ce n’était pas de la faiblesse; j’étais simplement un Hypoglycémique grave et non-traité. Ma santé était en jeu et mon corps a eu besoin de me lancer des messages extrêmes pour que je fasse les changements qui s’imposaient dans ma vie.

Résultat? Je vécu l’enfer pendant une longue période d’adaptation à une nouvelle forme d’alimentation, je perdis 75 livres (puis en regagnai 35, atteignant mon poids quasi-idéal), ma santé s’améliora grandement et je peux maintenant dire que si je ressens des symptômes d’hypoglycémie en cette période d’excès des Fêtes, je sais qu’avec un peu d’efforts je retrouverai assez rapidement la stabilité.

Pour tous les hypoglycémiques, il y a de l’espoir!

Quoi manger pour contrôler son hypoglycémie

La PIRE chose à faire face à l’hypoglycémie est de chercher à combattre ses symptômes par une ingestion rapide de sucre; cela ne conduit qu’à la perpétuation du problème. Un peu comme si on donnait une bière à un alcoolique en manque ou de l’héroïne à l’ex-toxicomane.

Puisque le problème de l’hypoglycémique provient d’une incapacité à bien gérer le glucose, il faut réduire au minimum l’apport en sucre et ainsi forcer le corps à convertir les graisses en glucose grâce à un processus appelé néoglucogénèse. En remplaçant le sucre par les protéines et les graisses, on force l’organisme à travailler plus fort pour obtenir son sucre et on instaure une protection supplémentaire face à l’hypoglycémie, permettant au corps de transformer les lipides et protéines en énergie à son rythme. En réduisant son apport quotidien en glucides, non seulement stabilise-t-on ainsi son taux de sucre, mais en plus on perd du poids et améliore sa forme. La totale, quoi!

En outre, il faut remplacer les sucres simples par des sucres plus complexes, qui ont généralement un index glycémique plus bas. Exit le pain blanc, les céréales, le riz blanc ou brun, les patates, les carottes cuites! Bienvenue aux légumes, viandes, légumineuses, noix! Le principe est relativement simple à comprendre: plus un aliment est riche en sucres simples, que ce soit du glucose (confiseries), de l’amidon (pommes de terre, carottes cuites) ou du fructose (fruits), plus son absorption par le corps est rapide, car simplifiée. En mangeant ce type d’aliments, le taux sanguin augmente rapidement, entraînant une réaction excessive et démesurée du pancréas, causant par la suite une baisse importante du taux de sucre et tous les symptômes qui l’accompagne.

Changez votre rapport à la nourriture

Alors, comment ai-je réussi à passer d’hypoglycémique hors-contrôle et obèse à une personne d’un poids normal et qui maîtrise son taux de sucre? Grâce à un changement majeur dans mon alimentation, bien évidemment!

Le problème de nombreux hypoglycémiques est qu’ils aiment trop les plaisirs de la bonne chère. Que ce soit une conséquence d’une enfance où les meilleurs moments se sont produits autour d’une table ou à cause des aléas de la vie, ils ne mangent pas toujours simplement pour faire fonctionner leur corps, mais aussi pour le plaisir de manger, pour compenser un vide ou se servent de la nourriture comme d’une drogue pour calmer leurs angoisses. Ce rapport dysfonctionnel face à la nourriture peut ou non être responsable de l’hypoglycémie, mais une chose est certaine : si un hypoglycémique ne change pas sa relation à la nourriture il continuera de vivoter, pris entre des pics et des creux qui nuisent non seulement à sa qualité de vie mais également à celle de sa famille, ses amis, ses collègues de travail, etc.

Si vous désirez changer ou aider un proche à changer, vous devez voir l’acte de manger de la même façon que lorsque vous mettez de l’essence dans votre voiture : vous vous donnez de l’énergie, simplement. L’automobile ne ressent pas de plaisir lorsque vous l’emplissez; vous lui donnez simplement le meilleur pour lui permettre de vous amener le plus loin possible. Et si vous ne lui donnez pas du vieux fioul ou autre carburant sub-optimal, pourquoi le feriez-vous pour vous?

Nous sommes une machine très complexe, mais contrairement à l’automobile qui a besoin d’un carburant ultra-raffiné, notre corps a été conçu pour digérer des chaînes complexes de glucides, des protéines et des lipides, afin de nous permettre de non seulement utiliser l’énergie mais également la stocker. Si nous lui donnons un carburant inapproprié, nous l’empêchons de bien fonctionner et pouvons même le briser.

Il faut donc prendre conscience de ce simple fait : nous mangeons pour survivre. Si nous éprouvons du plaisir à le faire, il n’y a pas de honte, mais ce plaisir doit être balisé, tout comme un professeur qui aime boire sa bière le vendredi soir ne doit pas la boire en plein cours pendant la semaine. Il faut viser l’équilibre.

Le problème avec la personne hypoglycémique, cependant, est qu’elle est déjà déséquilibrée; ses organes sont débalancés. Prôner un équilibre dans ce contexte serait inutile; il faut au contraire appliquer une force contraire de la même force que le déséquilibre. Autrement dit : plus vous êtes hypoglycémique, plus vous devez changer votre rapport à la nourriture.

Mon expérience

Suite à ma troisième (et dernière) perte de conscience, j’ai modifié radicalement mon alimentation. J’avais déjà commencé à le faire après ma première crise, mais je n’y avais pas mis l’énergie nécessaire, me contentant de manger un peu plus « naturel », ce qui était insuffisant. Je mangeais encore beaucoup de sucre sous forme de fruits, de noix comme le cajou, de yogourt, de pain, etc. C’était insuffisant.

J’ai donc commencé à me faire des salades. Simplement. Pendant environ un an, j’ai mangé une salade à toutes les trois heures, avec tantôt un œuf tantôt du poisson, tantôt du tofu ou du poulet. J’allais chercher mes protéines, mes lipides, et ce traitement choc améliora beaucoup mon hypoglycémie. Et comme je ne suis pas parfait, je me permettais une petite exception (pain crouté santé + fromage) une fois à toutes les deux semaines.

Et croyez-le ou non, deux ans et demi plus tard, je mange toujours mes salades à tous les jours! Sauf qu’aujourd’hui, je peux passer quatre heures sans manger et j’arrive à me permettre de plus nombreuses exceptions, comme le vin, occasionnellement du pain, et même parfois des pâtes! Et, surtout, j’ai l’air en santé et plus jeune!

Le matin, au lever, je mange toujours la même chose : une salade (laitue, concombre, tomate, poivron, poireau, avocat) au tofu avec de l’huile d’olive. Quatre heures plus tard environ, et pour le reste de la journée, c’est le même type de salade avec d’autres protéines. Parfois, je me fais également une soupe avec du riz sauvage. Le cœur de mon alimentation consiste à manger des aliments qui ont un index glycémique bas, c’est-à-dire qui ne font pas réagir exagérément mon organisme et ne me poussent pas vers l’hypoglycémie.

Au début, j’ai eu beaucoup de difficulté à m’adapter à cette nouvelle façon de manger. Quand on est habitué à une alimentation hyper-sucrée, chimique, transformée, raffinée, et qu’on se met à manger des aliments sains et à l’index glycémique bas, on a l’impression que tout manque de goût et d’être en train de tomber malade tellement on se sent faible. J’ai passé à peu près deux semaines dans une situation vraiment difficile où je ressentais un véritable manque de sucre, me sentant faible, anxieux, angoissé, en état constat d’hypoglycémie, mais tout comme un alcoolique doit vivre le manque avant de guérir, cette étape s’est avérée essentielle afin de me permettre de retrouver la santé.

Apprendre à aimer le manque

Nous vivons dans une société de trop plein. Il y a trop de tout partout et pour tous les goûts. Nous mangeons trop, sommes sur-stimulés, soumis à un véritable barrage de sollicitations quotidiennes, ne dormons pas assez… Nous brûlons la chandelle par les deux bouts, sauf que cette chandelle représente notre lumière et lorsqu’elle s’éteint, nous sommes morts.

Aimez le manque! Attachez-vous à cette sensation de manque qui vous afflige et vous fatigue lorsque vous êtes en manque de sucre. Pensez à votre corps qui est en train de faire sa nécessaire néoglucogénèse et qui vous purifie. Profitez-en pour bien dormir, pour réfléchir à votre vie, pour prendre des décisions, bref pour être véritablement vous-mêmes, ce qui peut s’avérer difficile pour beaucoup de gens qui ne peuvent tolérer ce manque.

En effet, il y a des gens pour qui le silence est un ennui, le manque une tare et qui ne peuvent considérer leur existence sans stimulations constantes. Si vous voulez vaincre votre hypoglycémie, vous devez changer cette perception : vous devez apprendre à aimer le vide, apprécier le simple fait d’exister, sans stimulation externe. Juste être, bien manger, bien respirer, apprécier la vie. Puisque votre problème provient probablement d’une surcharge de sucres simples à long terme, vous devez apprendre à apprécier le manque de sucres simples pour rééquilibrer votre vie.

Évidemment, il ne s’agit pas de devenir un moine pour autant (quoi je crois que certains ont le coude qui lève assez facilement…). Vous devez reprendre le contrôle et après quelques mois vous pouvez réintroduire quelques stimulants, à dose contrôlée, et en étant toujours conscient que vous devrez en subir les conséquences si vous ne faites pas attention.

Vivre avec une personne non-hypoglycémique

Un des plus gros obstacles à la mise en œuvre d’une alimentation saine et propice à la maîtrise de l’hypoglycémie provient des proches. Par exemple, comment ne pas faire de rechute quand notre blonde, chum, ou famille mange beaucoup de sucre en face de nous?

Cette partie nécessite de l’amour, beaucoup d’amour, et une reconnaissance du sérieux du problème. Si vous ne prenez pas votre problème en main, comment pouvez-vous espérer que votre douce moitié le fera pour vous? Prenez-vous au sérieux et demandez à vos proches de s’adapter. Aurait-on idée de boire de l’alcool face à un alcoolique repentant ou de jouer au poker face à un ex-gambler? Non. Alors pourquoi manger du sucre devant un hypoglycémique?

Évidemment, on ne peut pas demander aux autres de se priver autant que soi. J’ai trouvé une façon originale de régler le problème. J’ai établi avec ma copine une liste des aliments verts, jaunes ou rouges. Les verts sont ceux qui ont un index glycémique bas et que je peux manger en tout temps. Les jaunes sont ceux qui ont un index glycémique moyen et que je peux consommer occasionnellement et avec modération. Les rouges sont ceux qui me sont interdits en tout temps.

Si au début j’ai eu beaucoup de difficulté avec les aliments rouges, au bout d’un certain temps j’ai réellement internalisé le caractère nuisible de ces aliments vides. Aujourd’hui, je ne mange plus de sucreries, gâteaux, crème glacée, bière ou autres aliments trop sucrés. Mieux, ils ne me tentent plus du tout.

Conséquemment, je demande simplement à ma copine d’éviter la zone jaune autant que possible, surtout en période de légère hypoglycémie suivant un léger excès (parfois voulu!). Ainsi, elle n’a pas à se priver et elle évite principalement quelques aliments que nous avons établis comme étant « dangereux ».

Exigez de vos proches qu’ils vous respectent et vous aident. L’hypoglycémie est une maladie qui peut avoir des conséquences graves sur vous à long terme, mais expliquez-leur à quel point votre tempérament peut s’améliorer lorsque disparaissent les violentes crises hypoglycémiques!

Votre vie peut changer

Ce n’est pas seulement votre tempérament qui s’améliore lorsque vous maîtrisez votre hypoglycémie, mais toute votre vie. Vos relations avec les autres deviennent meilleures, vous devenez quelqu’un de plus stable en qui il est plus facile d’avoir confiance, vous êtes plus mince, plus en forme, vous réduisez le stress imposé à vos organes, vous économisez en évitant les aliments raffinés et transformés, vous êtes moins fatigué, vous dormez mieux la nuit, vous ressentez moins d’anxiété…

Il y a tellement d’avantages à changer son alimentation pour enfin maîtriser son hypoglycémie que je ne pourrais tous les nommer ici. Qu’attendez-vous pour changer votre vie et devenir une meilleure personne?